Aperçu des revendications étudiantes en Roumanie

Posted on Juil 15, 2008 in Expédition 2008, Roumanie, Roumanie - Bucarest

Entretien avec Denisa Nica, vice présidente et responsable des relations publiques de l’Alliance nationale des organisations estudiantines roumaines (ANOSR). L’association apolitique, membre de l’European student union (ESU), regroupe soixante organisations locales, soit environ 500 000 étudiants dans toute la Roumanie. Chiffre impressionnant qui fait de l’«Alliance» la première organisation estudiantine roumaine auprès des pouvoirs politiques et des rectorats.

Safar : L’ANOSR est l’organisation la plus importante de Roumanie, quels sont vos champs d’action ?

Denisa Nica : Notre objet est vraiment de représenter les jeunes étudiants roumains dans leur quotidien. Par exemple, nous avons lancé une campagne de sensibilisation de l’opinion publique sur le problème du logement qu’on a appelé «sexe dans le même lit avec mes parents». Le titre et l’affiche étaient volontairement choquants : deux jeunes couchent ensemble entourés de leurs parents. Nous avons repris cette campagne française qui avait déjà inspiré la Belgique et l’Allemagne sur le problème du logement étudiant. Les loyers sont si chers en Roumanie que les étudiants ne peuvent avoir un appartement à eux. Ils n’ont alors que deux solutions : rester dans le logement familial ou s’entasser à cinq dans des campus délabrés. C’est très dur dans ces conditions de suivre sa scolarité.

S : Cette revendication a été entendue ?

DN : Oui, nous avons été reçu par le ministre du Développement durable et du logement. Il en est sorti le lancement d’une campagne officielle d’information sur les recours existants pour obtenir un appartement. Il est vrai que beaucoup d’étudiants ne savent pas ce à quoi ils ont droit. Ce n’est pourtant qu’un premier pas, nous savons qu’il faut rester vigilant sur les promesses du gouvernement de réhabiliter les campus délabrés et de construire de nouveaux logements.

S : Alors votre voix à un poids au sein du gouvernement ?

DN : Oui ! Par exemple, nous avons participé à l’élaboration et à la signature du pacte d’éducation lancé par le ministère dans le but de moderniser l’enseignement et la vie étudiante. Nous avons ainsi pu faire passer la représentation des étudiants aux conseils universitaires de 25% à 33%. Le financement des universités a aussi été discuté. Notre proposition d’un système basé sur le nombre d’étudiants et non sur la rentabilité des diplômes a été retenu. C’est très important pour nous car la très grande majorité des étudiants vont à l’université publique, moins chère et de meilleure qualité. Enfin nous militons pour passer d’un enseignement très théorique à une meilleure valorisation de la pratique, dépassant ainsi l’héritage des années Ceaucescu.

S : L’Europe a-t-elle apporté des changements notables dans la vie des étudiants ?

DN : Pour nous, l’Europe c’est avant tout l’ouverture vers l’étranger et la simplification des démarches administratives. La très grande majorité des étudiants roumains souhaitent partir étudier en Espagne, en Allemagne, en France… L’effet positif est donc d’avoir permis l’élargissement des horizons et l’enrichissement des formations universitaires. Mais il y a très peu de places : en moyenne 10 places pour une université de 1000 étudiants. Il y a donc une compétition très forte entre nous pour partir. Un autre effet négatif, de plus en plus présent, est ce que l’on appelle ici « l’export d’intelligence ». Les meilleurs partent et cherchent à s’installer dans les pays de l’Europe de l’Ouest. Bien qu’ici la possibilité d’accéder à des postes à responsabilités rapidement est bien plus élevée qu’ailleurs, les salaires sont trop bas et ne permettent pas de retenir les jeunes roumains. Mais ce phénomène est encore trop nouveau pour en tirer des conclusions. Nous sommes là pour inciter le gouvernement à regarder attentivement ce problème.

Propos recueillis par Oana, Floriane et Stanislas.

4 Comments

  1. toujours à bucarest?
    vous bougez quand dans les jolies campagnes du maramures ou de bucovine?
    bon voyage!

  2. Très bien cette retranscription d’entretien. Je voudrais savoir s’il s’est fait directement en français et si les Roumains continuent cette sorte de vénération de la langue française qui avait éé pour moi une véritable découverte mors de l’effondrement du régime communiste.

  3. Cet entretien a t il été réalisé directement en français ?

    Lors de l’effondrement du régime communiste, j’avais été surpris par la bonne connaissance de notre langue en Roumanie. Quand n’est-il aujourd’hui ? L’ouverture sur l’Europe modifie t elle l’approche des roumains sur la pratique des langues étrangères?

  4. Et bien oui!Et pourtant, les Roumains n’ont plus le meme interet pour le francais qu’auparavant… comme partout c’est l’anglais qui attire les foules. Le francais reste pourtant la premiere langue etrangere etudiee. Cet enseigement reste cependant principalement centre sur la grammaire… ils l’etudient en faite comme nous etudions le latin.
    Le francais a pourtant une place speciale, c’est la langue de la culture et des elites ; en rapport avec les liquidations et les enormes pressions que Ceaucescu a fait subire aux intellectuels roumains, le francais a cette place particuliere de la resitence culturelle.