Bucarest : plus ville européenne que capitale de la Roumanie ? Impressions en demi-teinte de deux jeunes roumaines sur la capitale de leur pays.
«Je n’aime pas Bucarest». Immenses rues, poussière et trottoirs défoncés, Oana, étudiante de 20 ans à Iaşi dans le nord-est du pays découvre sa capitale. Elle est surtout étonnée par le contraste brutal entre le délabrement de la ville et le luxe et l’opulence : grosses berlines aux sonos bruyantes, mode provocante de certaines bucarestoises… «Je ne pense pas que Bucarest représente mon pays». Ses yeux pas habitués aux capitales étrangères – c’est la première fois qu’elle quitte sa Moldavie natale – y voient une grande ville qui refuse l’identité nationale au profit d’un modèle trop occidental. «La Roumanie n’est pas l’ouest mais l’Europe centrale, de l’est. L’identité roumaine est dans les campagnes, les traditions sont dans les villages». Et les immenses panneaux publicitaires des grandes multinationales, les passants affairés les bras remplis de sacs entrants et sortants des grands centres commerciaux semblent lui donner raison.
«La nature n’est pas habituée à la ville»
Pour Cristina, étudiante pendant trois ans à l’université de la capitale, Bucarest n’a jamais eu de culture et d’identité propre. «Bucarest a toujours attiré les jeunes roumains en raison du faible taux de chômage et des opportunités plus nombreuses que dans les campagnes». Les vagues successives et continues de migrants auraient façonnées une ville construite «comme un ensemble de petits villages». Chaque région possédant sa culture propre, elles furent importées dans la ville sans jamais vraiment se mélanger pour constituer une identité propre.
Mais les mouvements migratoires n’expliquent pas tout. Cristina pointe aussi la gestion «chaotique» de l’urbanisme. «C’est une ville pas entretenue. Les mauvaises herbes poussent entre les dalles des trottoirs… c’est comme si la nature ne c’était pas habituée à la ville, alors elle reprend ses droits». Bucarest, ville contre-nature ? La Roumanie a en effet, tout au long de son histoire délaissé la ville au profit des villages. «C’est principalement avec les communistes que les grands complexes urbains ont été façonnés. Avant il n’y avait pas de grandes villes en Roumanie» nous dit-elle. «Aujourd’hui encore, avec le changement économique, les travaux et les aménagements se font à toute vitesse mais manquent de cohérence». En effet, partout poussent des complexes urbains ultramodernes tandis que des conflits de propriétés paralyses les rénovations indispensables aux immeubles déjà existants. Le régime de Ceaucescu avait chassé de leurs appartements bon nombre de propriétaires roumains. Ces infortunés d’hier reviennent aujourd’hui et réclament la restitution de ce qui leur a été confisqué.
C’est donc un amour vache que portent les Roumains à leur capitale. Elle semble porter les stigmates d’une identité roumaine marquée par un passé communiste et déstabilisée par une course effrénée à la consommation. La dynamique est pourtant là, bien perceptible. Le trafic intense, le boom immobilier et le rythme soutenu du quotidien des Bucarestois sont autant d’indices qui témoigne de la volonté de Bucarest d’égaler les autres capitales européennes.
Stanislas
On vous suit de France, et grâce à vous, on voyage….
Laetitia & Davo
idem… j’aime beaucoup lire vos impressions